Avec Mike Lackey, Bill Chepil, Marc Sferazza, Jane
Arakawa, Nicole Potter, Pat Ryan
Dans les bas-fonds de Manhattan où
vivent des épaves humaines, des sans abris réfugiés dans une casse de voitures
et des laissés pour compte, deux adolescents à la dérive, Fred et Kevin,
tentent de survivre malgré l’animosité que leurs vouent leurs antipathiques
voisins de rue. Un jour, l’épicier du coin découvre dans sa cave une caisse
remplie d’une boisson inconnue. Il se met à vendre ces bouteilles à très bas
prix, rameutant rapidement toute la faune locale. Mais cet alcool a des effets
désastreux. Ceux qui en boivent meurent en effet dans d'épouvantables
souffrances, transformés en flaques de bouillie jaunâtre...
Dans le domaine du mauvais goût outrageux, Jim
Muro, à peine âgé de 22 ans pendant le tournage, réussit à battre le Peter
Jackson de Bad Taste sur son propre
terrain. Viol collectif, nécrophilie, émasculation, scatologie et gore excessif
sont au programme de Street Trash
qui joue la carte de la surenchère sans le moindre garde fou. Le summum du
délire est atteint lorsque les clochards absorbent l’alcool toxique : les
corps gonflent, explosent, fondent, se décomposent, se liquéfient, dans un
festival d’éclaboussures sans retenue. L’auteur de ces effets spéciaux bien
dégoulinants est Jennifer Aspinall, qui avait eu l’insigne honneur de donner
naissance au Toxic Avenger quelques
années plus tôt. Jim Muro désamorce cette accumulation de sang, de vomi,
d’urine, de chair putréfiée et de cadavres disloqués par un ton burlesque
systématique qui donne souvent à Street
Trash les allures d’un Tex Avery version hard.
L’épilogue, qui se déroule
pendant le générique de fin, semble carrément échappé d’un film des ZAZ. Parmi
les délires gras du film, on note aussi la bouteille de gaz qui est propulsée
dans les airs et décapite salement un colosse barbu dont la tête va s’échouer
quelques mètres plus loin. Et puis une mention toute spéciale à la partie de
volley entre clochards dans laquelle la balle est remplacée par un pénis
fraîchement arraché ! Pour éviter les foudres de la censure, Muro procède
de la même manière que Sam Raimi pendant le tournage d’Evil Dead 2, c’est-à-dire en évitant les giclées de sang écarlate.
Si des fluides innombrables inondent l’écran tout au long de Street Trash, ils sont volontiers
multicolores, muant du coup tout effet sanglant en abstraction pure.
Bizarrement,
au beau milieu de ce délire bien gras semblent émerger un désenchantement et un
désespoir qui mueraient presque ce « splatter » en film d’auteur. Cet
enchaînement de violences et de bassesses va même jusqu’à évoquer – toutes
proportions gardées – certaines des toutes premières œuvres d’Abel Ferrara et
Martin Scorsese. Un peu comme si Jim Muro s’était servi du véhicule « film
d’horreur » pour traduire une sorte de misanthropie désemparée. Toujours
est-il que Street Trash sera son unique
film, notre homme se tournant par la suite vers de plus sages activités, c’est-à-dire
le maniement virtuose d’une steadicam dans bon nombre de films d’action,
notamment pour James Cameron (Terminator 2, Titanic), Martin Scorsese (Casino)
et Katherine Bigelow (Strange Days).
Pour l’anecdote, Bryan Singer, futur réalisateur d’Usual Suspects et X-Men,
fit ses débuts sur Street Trash en
tant qu’assistant.
© Gilles Penso
Thema: Mutations
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